la frontiere entre Turquie et Syrie Bordel au passage a la douane. Chacun tend son passeport, certains avec quelques billets, refuses, en recupere d'autres, pas forcement a eux. Au bout d'une heure on repart avec le tampon et ca y est, c'est le debut des pays arabes. La route est calme, circule entre les forets de pins et les petits villages. On descend vers Lattakia le lendemain et tout change. On se fait interpeler a tout bout de champ et meme insulter. Heureusement le soir nous sommes recueilli par une famille. Haala, la maman, nous empiffre de fruits, de frites, riz et poulet. On passe la soiree ensemble avec ses quatre enfants, Lama et Line, ses deux jumelles de 17 ans, le jeune Ali et le petit Ahmad. La maison est a l'europeenne, le poele pour la deco fonctionne a l'huile, le grand mur rouge du salon attend un ecran plasma tout neuf.
Au matin, Delphine et Luc sont malades. La journee passe, Sophie a apprendre l'arabe, Delphine qui se leve pour une partie de cartes, et Luc pour quelques minutes au soleil sur la terrasse. Le soir on tient compagnie a Haala qui prepare des rouleaux de riz. On goute aussi le zaatar (sorte de thym ecrase avec de l'huile d'olive et une plante citronnee, le tout avec des graines de sesame), que l'on met sur des pains plats. On echange photos.
la famille d'Haala
On experimente le lendemain l'autorite syrienne et sa parano. Installes tranquilement dans l'herbe, voici deux voitures de militaires qui viennent nous controler. L'officier execute les ordres de son superieur par telephone, controle nos appareils photos, deux fois nos passeports, et nous demandent de partir en s'excusant, sans donner d'explications.
Autant la plaie de la Turquie c'est les chiens, autant ici c'est certains syriens. Les aboiements continuent a notre passage, et c'est limite si certains ne viendraient pas mordre. On n'est meme plus tranquille pour pisser un coup. Le soir on reussi a s'abriter des regards sous la route dans un petit vallon.
On termine de passer les montagnes syriennes direction l'Est ou Akran, une vieille femme qui fait toutes sortes de pains plats dans une bicoque, nous invite a la chaleur du four rustique. Elle nous sert le the et devant nos mines impressionnees enduit la pate a pain d'une garniture rouge pimentee qu'elle plaque ensuite contre le bord du four. C'est cuit en quelques secondes, colles ainsi sur les rebords en terre.
Le soir on s'installe entre les oliviers et sirotons trois bieres, en esperant ne pas voir l'arrivee de militaires. On decoupe le blason des cannettes et baptisons nos velos Faxe, Turbo et Petra.
Le mardi 9 fevrier, depart sous la pluie. Peu de temps apres, alors que nous nous abritions sous un petit auvent, des militaires en civil nous assaillent de questions et nous demande de partir.
Des le debut de l'apres midi, nous nous arretons dans une maison en construction apres avoir plonge nos velos dans un bain de boue. Nous sommes a Barin. William, Suleyman et son pote Suleyman viennent nous voir. Dormir ici, pas de soucis, meme s'ils nous prennent pour des tares. Ils rapportent plein de bois et nous font un feu a la syrienne, ce qui consiste a asperger le bois vert de vieille huile de moteur et a flamber le tout. Quelques heures apres, un homme de la famille arrive avec sa voiture et nous invite a dormir au chaud dans la maison secondaire de son frere Markus. William emprunte le velo de Luc, qui monte dans la voiture. Nous nous retrouvons un kilometre plus loin. Markus, du haut de ses 44 ans a l'air d'un ado, attife d'un jogging Fila orange, ses tattoos sur le bras, ses cheveux mi-longs frises. Ambiance frenchie avec Gainsbourg en fond sonore et un petit verre de blanc du Gers. Decoration kitsch et bar bien rempli. La famille debarque suivie de Suleyman, verre de whisky avec glacons. On se couche, Leonardo DiCaprio veillant bien sur nous.
L'appartement de Markus a Barin
Le Mercredi 10 nous arrivons a Homs. Nous avons rendez vous avec le Docteur Ahed El Abed. Il nous accueille dans son cabinet. "Ah ! voila les colmariens !" Accroche au mur un tableau de la maison Pfister. Il libere 2 heures dans ses consultations et nous emmene visiter l'eglise St Elian, puis celle de la ceinture de la Vierge. Comme les anciennes maisons de Homs, elles ont ete construites avec les pierres noires volcaniques de la region mais recouvertes plus tard de crepis qu'on retire aujourd'hui. Ahed retourne a ses consultations tandis qu'on se balade dans le souk et prenons the et chicha dans un vieux cafe traditionnel nomme Alfarah ou le gerant sympathique vient nous faire la conversation. L'endroit, une ancienne ecurie, est immense, au plafond haut sont suspendus des lustres, les hommes boivent leurs thes et fument leur chicha, parlent pendant que le serveur a charbon alimente les narguiles.
Le cafe Al Farah
Le soir on prend la voiture pour se rendre dans la maison que construit Ahed, face au Krak des chevaliers a Kafra, 50km de Homs. Sa maison, en realite, ressemble plus a un chateau. Les lourdes portes en bois decorees de fer forge s'ouvrent sur la propriete immense qui arbore les fameuses pierres noires de Homs, et les pierres blanches de la region de Safita. Dix ans de travail et encore plus peut-etre pour terminer ce reve. On etablie nos quartiers au rdc deja habitable. Ahed ouvre une bonne bouteille de rouge de la plaine de la Becca au Liban, pour accompagner puree de pois chiches, d'aubergines, poulet a la sauce de sesame, taboule, viande hachee, feuilletes au fromage... Discussion interressante sur l'hospitalite. On apprend que les bedouins avaient l'obligation d'accueillir un etranger sans lui demander son identite pendant les trois premiers jours. On se couche tres tard, s'adaptant aux horaires syriennes.
Qalat Al Hosn
Petit dejeuner typique, manahisch au zaatar ou au fromage. Nos ventres sont remplis et la journee l'est tout autant. Nous visitons le Crac des Chevaliers. Construit par les Kurdes il est ensuite occupe par les Croises. C'est une forteresse aux murs enormes de pierres blanches. La carriere est situee non loin. Il y a d'immenses salles voutees eclaires seulement par les ouvertures ou passe le soleil.
Nous partons ensuite en voiture a travers a travers les montagnes recouvertes d'oliviers pour arriver a Safita. On rencontre deux vieilles amies du Dr qui vivent dans une ancienne maison en pierre blanche. Nous visitons une autre construction en pierre blanche qui est la Tour de Safita. Elle s'eleve de sa masse rectangulaire au dessus de la ville. Au rez de chaussee, la chapelle, au premier etage, la salle des chevaliers, en haut, a 38m, le toit servait de relais avec le Krak. Au loin la mer, tout autour, les montagnes pleines d'oliviers et parsemees de petits villages et plus loin les sommets enneiges du Liban. Vers 17h nous visitons le couvent St Georges, haut lieu de pelerinage, situe en contrebas du Krak des chevaliers. Dans une premiere piece, un des trois testament du prophete Mohamet, traite sur la tolerance entre les differentes religions du Proche Orient, absurdite des guerres... On redescend dans le temps et dans le sol, 18e siecle, la plus grande eglise ou l'on assiste a la messe du coucher du soleil, 12e siecle un etage plus bas, puis la crypte aux passages etroits et lourdes portes en pierre mis a jour il ya seulement 6 ans.
Avant de partir, nous faisons encore un tour dans la maison et le jardin de Ahed. C'est un musee vivants. des pierres collectionnees peu a peu recuperees d'anciennes maisons. Des colonnes marquees de la croix de Malte, des mortiers en pierre, des lintaux sculptes, des portes en bois du 18e. Un condense de l'architecture des environs, un puzzle agence avec patience. Ahed connait l'histoire de chaque pierre. Dans le jardin les essences de France cotoient celles de la region. Des oies, des poules dont nous avons mange les oeufs ce matin. Et partout une vue sur les montagnes et le Krak. Lorsque Ahed ouvre le pigeonnier et que les pigeons voyageurs s'envolent et tournoient autour de la maison, le spectacle est a son comble. Merci a lui pour son accueil tres chaleureux.
Nous partons avant midi en direction du Liban.