lundi 17 mai 2010

Tunisie

nos vélos pour l'avion

2h de vol et nous voilà à Tunis. Dans les aléas des transports de bagages aériens, un boulon du vélo de Delphine a été perdu. On prend un taxi et un petit hôtel a Tunis. Le climat n'est pas le même, la verdure nous étonne, ainsi que le ciel nuageux. 20°C, mais il fait frais!!! On sort se balader en ville. Premier thé tunisien, fort et sucré, avec des feuilles de menthe fraîches.



Tunis

Décidément, nous sommes déboussolées, on pourrait s'imaginer en Europe: les gens nous parlent un francais impeccable, la rue est propre, il y a même des trottoirs pour marcher dessus. La nostalgie du Caire s'efface lorsque nous commencons à descendre vers le sud tunisien.
En attendant il faut bien s'occuper des choses sérieuses. Nous allons au consulat algérien près du parc du Belvédère. Dès le matin nous sommes mises au parfum : contrairement aux dires de l'ambassade à Strasbourg en octobre 2009, le visa ne nous sera pas délivré à Tunis. Il faut se présenter en personne dans une ambassade algérienne en France. Nous voilà à nouveau devant une impasse. L'impasse, c'est le visage souriant mais incoromptible de la femme avec qui nous discutons au consulat d'Algérie, rue du Niger, à Tunis. On rebondit vite: ils ne veulent pas de nous? Tant pis. On réserve le vol le moins cher pour aller à Casablanca, le 18 mai 2010. Et ca nous donne tout de suite des idées. Pourquoi pas faire une rando autour du Toubkal? Ca nous changerait... Le lendemain, quelle surprise! Nous recevons un mail de Bernard Rabere qui aterrit le 19 à Marrakech pour entre autre faire l'ascension du Toubkal... Quel hasard, qui nous ravit bien sûr... Mais notre condition n'est plus la même... Depuis un mois le compteur sur le vélo de Delphine en est toujours au même point.

Nous décidons de partir vers le sud, en bus et en stop; nos vélos restent bien sagement, en pièces détachées, enfermés dans la pièce sombre du dessous de l'escalier; (oui les pauvres, je sais, on n'abandonne pas ainsi sa fidèle monture).

Kairouan
A Kairouan, nous rencontrons un jeune rêveur philosophe de 22ans. Il est très cultivé et attend la femme parfaite. Achref nous invite chez sa tante où il vit, en préparant son bac. Un soir, nous allons avec lui voir sa grand mère dans un quartier populaire de Kairouan. Nous en voyons beaucoup de ces maisons blanches, aux fenêtres et portes aux couleurs pastels, aux cours intérieures calmes et fraîches. La grand mère est habillée de tissus aux couleurs et aux motifs divers, avec deux grosses attaches triangulaires en argent. Achref nous emmène aux bassins des Aghlabides, à la grande mosquée, au Mausolée.



Du vendredi au samedi, nous allons avec lui rendre visite a son père, sa mère et six de ses huit soeurs à Sarja, près de El Alaa. Une maison perdue au milieu des montagnes arides, des champs d'oliviers et des vergers, un cheval, des poules et des poussins qui courent dans nos pieds. Les filles nous offrent des petites roses fraiches qui sentent délicieusement bon, les ouarda. Elles font des pains dehors dans le four en terre. La maison est petite et sobre, mais ils possèdent des champs immenses grâce au travail du père qui est un homme bon et droit, nous dit Achref. La Maman nous prépare (entre autre) un coucous. On marche dans les montagnes. Paysage apaisant... Silence... Jusqu'au lac 'ain oued Karma ('ain signifie "lac" et aussi "oeil") on traverse les champs, enjambant les haies de cactus et de figues de barbarie. Au milieu du paysage sec, un lac aux berges de sables mouvant, une île en son centre où pousse une verdure tendre et épaisse.


Gabès
A Gabes, nous passons rapidement. Juste le temps de passer une soirée avec Nizar et Abd el Salam, dans un café qu'eux deux et les étudiants en art ont aménagé: "Bab el Hara". Soirée avec ces deux gars qui sont dans le domaine des arts, architecture, théâtre et graphisme. Rencontre simple et désinteressée, en se quittant, on se dit au revoir comme de vieux copains.

Matmata

Deux jours de petites rando et deux nuit à la belle dans ce paysage désertique, avec, cachées dans les recoins de la montagnes, ces maisons troglodytes.


Un jour, nous parcourons une crête, alors que depuis une heure, un homme à la casquette jaune nous suit. Il vient d'une tente à côté de laquelle nous sommes passées. Nous descendons à l'autre bout de la crête par un petit chemin, vers une maison troglodyte abandonnée que nous avons repérée d'en haut. Nous nous arrêtons là. L'homme nous rattrape. Brides de paroles échangées, nous placons le peu de mots d'arabe que nous connaissons. Sa tronche ne nous dit rien qui vaille. On ne lui dit pas qu'on veut dormir à la belle.
"Nous allons à Matmata".
"C'est par là".
Oui on sait. On se quitte, il repart de son côté. Nous allons vers Matmata. Eh non, le voilà qui est revenu et nous suit à distance. Le vallon est large, on le laisse nous dépasser gentiment. Marchant à 20m devant nous, il se retourne sans cesse pour voir ce que l'on fait. Puis il bifurque à nouveau vers la droite, vers les montagnes où il a sa tente. Cette fois c'est bon, il a simplement dû prendre un meilleur chemin pour rentrer. On continue vers Matmata, sachant bien qu'il observera la montagne ou vérifier où l'on va. On prend le vallon à gauche. Après une quinzaine de minutes, qui voilà derrière nous? "Casquette jaune" nous suit. on s'arrête. Il arrive à nous.
"Mà mouchkella? Ayna baïtouka?"
"Là haut" montre-t-il de son doigt, le bras tendu vers les montagnes d'où l'on vient. Puis il se rattrappe:"heu, non, Matmata, Matmata, j'habite à Matmata".
Enervées par ce comportement, on lui fait signe de passer, après vous, je vous en prie! Cette fois, on le suit! Il passe derrière l'arête qui mène au tout petit col vers Matmata, quand il disparaît, on monte à fond dans la pente, cachées par l'arête, vérifiant que notre ami ne fait pas demi-tour. On arrive en haut de la montagne, il y a une grotte très étroite au pied du rocher. On y met nos sacs, on se case dedans comme on peut. On se sent comme des hors-la-loi, traquées. Ca nous réjouit. Plus tard, sur l'arête toute proche un homme passe. Est-ce lui? Mais il n'a pas de casquette jaune. Le soleil se couche face à nous, il n'est pas à notre avantage. Mais la minuscule grotte est notre refuge... Plus personne ne vient. Le soleil est couché et un grondement sourd et grâve résonne dans tout le ciel, qui s'est couvert de nuages. Le lointain est brumeux. Le grondement semblable a du tonnerre reprend. On n'en a jamais entendu de semblable. Etrange... Le vent est plus froid. Mais l'orage tant attendu n'éclate pas.



désert de Matmata

Douz
Nous faisons du stop jusqu'à Douz. Un homme nous prend dans son pick-up à moutons, Sur la route entre Tamezret et Douz. Chose incongrue dans ce désert, à deux reprises, nous voyons des occidentales blanches comme des culs, en mini-shorts et débardeurs moulants, assises jambes (très, très) écartées sur les bornes kilométriques. Elles se font prendre en photo par leurs amis. Voilà l'image du touriste qu'elles véhiculent. Il ne peut y avoir meilleure image pour représenter la vulgarité. Le stéréotype de la femme facile qui accepte tout, gravé dans l'esprit de beaucoup d'hommes que nous avons croisés ici et au proche-Orient, est pas venu de nulle part. Ces touristes vivent et voyagent dans une bulle, leur bulle occidentale, cocon confortable pour l'esprit, qui fait qu'elles ne se rendent pas compte de l'impact de leurs actes. Avouons-le, elles nous font un peu pitié. A Douz, petit village au bord du désert, qui tente de ne pas se faire manger par le sable, nous retrouvons la chaleur. Avec Khaled et Ichem, nés ici, nous buvons un café puis faisons un tour dans le désert de dunes, en passant par la porte du Sahara.


Iles Kerkennah




Le trajet Douz-Kebili-Gabès-Sfax est avalé d'un coup... Plusieurs heures de route qui nous permettent de prendre, dans l'après-midi du 13 mai, le bateau qui se rend sur les îles Kerkennah. On bivouaque non loin de la mer dans un champ de palmiers. On se lève tôt, il pluviote. Depuis combien de jours n'avons nous pas vu de pluie? Depuis combien de temps, ce ciel irlandais, cette mer de Bretagne? La pluie est timide. Nous marchons jusqu'à Mellita. L'île est peu peuplée, sauvage. Quelques maisons, des cabanes en bois, certaines sur pilotis avec des terrasses, quelques bateaux de pêcheurs. Des champs de palmiers, des champs d'oliviers. On prend un louage pour retourner au port, sur l'intuition heureuse et involontaire de Delphine: nous arrivons a temps pour le seul et unique bateau qui part aujourd'hui et peut-être dans les prochains jours. Il y a un nouveau différent entre les autorités tunisiennes et l'île en partie indépendante.

Sfax
Nous passons deux jours à Sfax. Ses remparts, la médina et ses étroites ruelles, pleines de marchands, sa place où l'on trouve des habits pour 500millimes. Ses marchés aux fruits et légumes, le marché aux poissons. On achète des abricots plus mûrs que mûrs, des dattes. On boit les typiques cafés au lait. Quelques croquis. On parle avec un farouche accent alsacien quand certains lourdingues nous draguent avec insistance.




De retour à Tunis, dernières préparations avant de prendre, encore, l'avion...

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Alexandrie




2 et 3 mai 2010, deux jours a Alexandrie. Avec Quentin, nous prenons le train et arrivons en fin d'après midi dans la ville méditérranéenne. On débarque dans un quartier loufoque où le tramway vétuste circule entre les immeubles un peu crado de style hausmannien. En marchant sur le bord de mer, on se croirait à Nice. Le vent est frais, Et après un café au lait (ou plutôt un lait de chèvre au café avec mousse de lait, absolument exquis) nous trouvons un petit coin sur la plage ou passer la nuit a la belle étoile.




Le lendemain, nous expérimentons le tram alexandrin. On serait probablement allé plus vite à pied, mais le spectacle est intéressant. Les antennes du tram sont tenues par de vieilles ficelles, dont l'une d'elle lâche. Le conducteur y fait un noeud, replace l'antenne; a nouveau le contact entre les câbles est fait, on repart. Visite du chantier naval de bateaux en bois. Les courbes, la couleur du bois, l'odeur qui s'en dégage... sur la plage de sable, au milieu des carcasses de bateaux a réparer et des bateaux neufs en construction, nous rencontrons quelques ouvriers qui nous donnent quelques tuyaux du métier. Dire que ces constructions vont flotter sur l'eau...




Nous avons encore le temps de voir la fameuse bibliothèque. Cette architecture contemporaine est très grande, très spacieuse, à la lumière feutrée. On se ballade a l'intérieur un petit moment, s'arrêtant pour feuilleter quelques bouquins au passage, dans une atmosphère studieuse de B.U.



Un foul plus tard, le train nous ramène au Caire, ou avec quelques bières nous passons une dernière soirée avec nos colloc de la rue Haroun. On prépare nos dernières affaires. Le lendemain a 8h, un dernier foul au pied de l'immeuble chez le petit vendeur ambullant, avec Quentin, Carmen, David, Ibrahim, Abu Horaira. Derniers instants au Caire. Le taxis arrive, on y charge nos vélos, nos bagages. Direction l'aéroport. On se sent tout gemusch, comme à une rentrée des classes... Adieu l'Egypte! Une grande page se tourne, on est déracinées!

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